Pour comprendre comment le cannabis peut modifier la sensation de faim, les chercheurs ont commencé en 1970 à étudier l’effet du THC sur les
comportements alimentaires. Les résultats ont été clairs dès le début : les
sujets traités avec cette molécule avaient envie de consommer beaucoup plus,
ils avaient plus d’appétit et ils
appréciaient d’avantage la nourriture.
Depuis,
plusieurs études ont confirmé cette action
hyperphagique du THC tant chez l’être humain que sur des
nombreux modèles animaux. Chez les rats, l’action de THC est si puissante qu’il
les pousse à manger même quand ils sont gavés.
De la même manière, des études ont montré
les effets orexigènes, c’est-à-dire stimulateur de l’appétit, par l’action des
ECBs. Nous allons détailler les expériences menées.
- Figure 1.A : des rats ont ingérés différentes doses d’anandamide, un des principaux endocannabinoïdes trouvé dans le cerveau. Les résultats montrent bien que toutes les doses d’anandamide ont provoqué une hausse importante de la prise alimentaire mesurée 3heures après administration de celle-ci. Pour une dose de 1,0 mg/kg que l’augmentation de la prise alimentaire induite par l’anandamide est la plus forte.
- Figure 1.B : une deuxième expérience a été réalisée, les souris ont reçu une dose d’anandamide couplée à une dose d’un antagoniste au récepteur CB1 (rimonabant=SR141716). Cet antagoniste est une molécule qui se fixe sur les mêmes récepteurs que l’anandamide (récepteurs aux cannabinoïdes) et qui empêche celle-ci de produire ses effets habituels. Grâce à cet antagoniste, ils ont tenté de bloquer les actions hyperphagiques pour une dose de 1 mg/kg.
Bilan :
le rimonabant administré tout seul aux
souris n’a pas d’effet sur la prise alimentaire pour des doses faibles (0.1,
0.5 mg/kg) mais il diminue la prise alimentaire pour des doses élevées (1mg/kg). De
manière intéressante, le rimonabant à des doses de 0.5 et 1mg/kg bloque les effets de l’anandamide, qui est de
promouvoir la prise alimentaire. Ainsi, au lieu de consommer 4g de nourriture
sous l’effet de l’anandamide, lorsque l’on donne en plus au souris du
rimonabant (doses : 0.5 et 1mg/kg), une atténuation de l’hyperphagie est
observée, les souris consomment plus que 1 -2 g de doses. Ainsi, le rimonabant bloque l’augmentation de la
prise alimentaire induite par l’anandamide.
Cette
expérience révèle également que les récepteurs CB1 sont bien à l’origine de
l’augmentation de l’appétit. Les récepteurs CB2 n’interviennent pas dans cette
action hyperphagique.
Figure 1. A
Effets sur la prise alimentaire en fonction des doses d'anandamide.
Figure 1. B
Atténuation de l'hyperphagie (due à l'anandamide) par le rimonabant.
Bâtons bleus : anandamide (O,5 mg/kg ; 1,0 mg/kg ; 5,0 mg/kg ; 10 mg/kg) combinée à différentes doses de rimonabant.
Bâtons verts : Anandamide (1mg/kg) combinée aux doses de rimonabant.
Effets sur la prise alimentaire en fonction des doses d'anandamide.
Figure 1. B
Atténuation de l'hyperphagie (due à l'anandamide) par le rimonabant.
Bâtons bleus : anandamide (O,5 mg/kg ; 1,0 mg/kg ; 5,0 mg/kg ; 10 mg/kg) combinée à différentes doses de rimonabant.
Bâtons verts : Anandamide (1mg/kg) combinée aux doses de rimonabant.
De plus, d’autres expériences ont confirmé qu’en plus des endocannabinoïdes,
le THC peut lui aussi augmenter la prise alimentaire. De la
même façon que pour l’anandamide, le rimonabant bloque l’induction de
l’hyperphagie par le THC.
Figure 2 : Atténuation de l'hyperphagie (due au THC) par le rimonabant.
Bâtons pleins : effets du rimonabant seul
Bâtons vides : effets du rimonabant combiné au THC (1 mg/kg°)
* ou *** : atténuation plus ou moins significative de l'hyperphagie engendrée par le THC.
Si les cannabinoïdes endogènes et exogènes
augmentent la prise alimentaire, on peut tout de même noter quelques
différences :
- Pour des concentrations similaires de cannabinoïdes,
le THC a un effet plus important sur la prise alimentaire que l’anandamide.
Une des explications pourrait être que le
THC a une plus grande affinité avec le récepteur aux CB1 que l’anandamide.
- Le rimonabant (antagoniste au récepteur CB1) ne bloque pas complètement les effets du THC, contrairement à ceux de l'anandamide.
Enfin, les scientifiques
se sont aperçus que l’action de cette drogue est accentuée lorsque les rats
sont nourris avec une alimentation appétissante et grasse. L’ingestion du
cannabis augmenterait la prise de nourriture savoureuse et odorante.
=> On s’est donc demandé si cette
augmentation était due à une modification des sens, c’est-à-dire que l’on
perçoit mieux les odeurs, le goût, …
Nous avons également pensé que peut-être le système de récompense jouerait un rôle, en augmentant le plaisir lorsque l'on mange.
Nous avons également pensé que peut-être le système de récompense jouerait un rôle, en augmentant le plaisir lorsque l'on mange.
Ainsi, ce blog met l’accent sur les
processus physiologiques faisant que les cannabinoïdes nous font manger en plus
grande quantité.
Nous avons donc émis deux hypothèses,
qu’il s’agira ensuite de vérifier et d’expliciter:
- Nous mangeons plus car cela nous donne plus de plaisir.
- Nous mangeons plus car les cannabinoïdes modifient nos systèmes sensoriels. Au sein de ses systèmes sensoriels, plusieurs paramètres peuvent changer l’habituation, la détection ou encore la discrimination. Est-ce tous les paramètres qui sont altérés ou un seul ?
Où sont-ils localisés ?
Sources:
William & Kirkham (1999) anandamide induces overeating mediation by central CB1
William & Kirkham (2002) reversal of delta-9-THC hyperphagia by SR141716 and naloxone but not dexfenfluramine
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